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Ivry, l'incinérateur et ses technologies controversées

À LA "MODE" AU DÉBUT DES ANNÉES 2000, LE TMB-MÉTHANISATION FONCTIONNE-T-IL VRAIMENT ? L'INCINÉRATION EST-ELLE TOUJOURS ADAPTÉE AUX NOUVEAUX ENJEUX DE LA GESTION DES DÉCHETS ? 

TMB-méthanisation : deux technologies surestimées


En théorie, le Tri Mécano Biologique est censé séparer parfaitement les restes organiques des matériaux inertes de nos poubelles pour en tirer du compost utilisable par les agriculteurs, le reste partant à l’incinération. La réalité est pourtant bien différente. Comme en témoignent les expériences précédentes à Montpellier et à Fos-sur-Mer, la séparation des matières ne se fait pas correctement. De même, l’ADEME estime que les usines TMB ont « du mal à fonctionner de manière optimale par manque de maturité technologique ».


En effet, selon certains experts, le compost reste de mauvaise qualité car contaminé par des métaux lourds ou des matières chimiques. Le Centre Commun de Recherche (CCR) a même rendu un avis défavorable quant à l’utilisation du compost issu du TMB dans l’agriculture. On s’en débarrasse alors en décharge ou en incinération.


La méthanisation, elle, présente un risque d’explosion, lié à certaines substances contenues dans le biogaz. Il y a déjà eu des incidents dans les installations existantes. Par ailleurs,  ces gaz entraînent de mauvaises odeurs dans le voisinage. Tout ceci rend difficile  l’installation d’une usine de méthanisation en milieu urbain.


De plus, les opposants au projet critiquent la composition du biogaz produit par la méthanisation. Selon eux,  il n’est pas assez pur pour être utilisé directement comme carburant, source de chaleur, ou d’électricité. Il faut donc le purifier. Or, ce nouveau traitement conduit à consommer à nouveau de l’énergie et à émettre des gaz polluants.


L'incinération, une solution adaptée au contexte parisien


Elle est sûre et adaptée. L’incinération reste la meilleure technique pour traiter les déchets ménagers, selon les partisans du projet. Même l’ADEME reconnaît que l’Ile-de-France est l’une des régions pour laquelle il est le plus intéressant de mettre en place une usine d’incinération. Deux raisons expliquent ce choix : une grande quantité de déchets à traiter et des réseaux de chaleur très structurés en milieu urbain, capables d’optimiser au mieux la chaleur produite par l’incinération.


Pour le SYCTOM et les élus locaux, impossible de se passer d’incinérateur : les ménages ne font pas assez de tri sélectif et les tonnages de déchets sont toujours élevés, en raison de l’augmentation de la population.


Le SYCTOM est confronté à deux contraintes : tout d’abord, il doit suivre les engagements de réduction de déchets pris au niveau européen et national, et donc diminuer la quantité de substances incinérées de 7 % sur les cinq prochaines années. Ensuite, il doit suivre la Directive européenne 2008/98/CE du 19 novembre 2008 sur la hiérarchie du mode de traitement des déchets qui privilégie la prévention et le réemploi. 

A Ivry-sur-Seine, le projet propose de diminuer le tonnage de déchets entrants de 730 000 tonnes actuellement, à 544 000 tonnes dont 350 000 traitées par incinération. Cela  s’appuie sur une diminution du taux de déchets, de l’augmentation des collectes sélectives et de l’évolution des usages des ménages.


Enfin, l’incinération à Ivry produit actuellement de la chaleur et de l’électricité pour 100 000 équivalents logements. L’incinération peut donc être considérée comme une forme de valorisation énergétique.


Mais la technologie est dépassée

 

Elle est polluante et chère. Malgré des traitements obligatoires en sortie de cheminée d’usine, l’incinération des déchets émet des fumées toxiques, composées de dioxines, pouvant entraîner des problèmes de santé pour les riverains. Selon le CNIID, plus de 1 000 polluants en sortie de cheminée ne font pas l’objet de mesures de suivi. En Ile-de-France, la plupart des déchets ménagers sont incinérés ou mis en décharge. L’incinération ne brûle pas 100 % des déchets. Elle produit des résidus solides, appelés mâchefers, dont une partie finit en décharge.

 

Nos poubelles contiennent de nombreux déchets alimentaires, riches en eau. Leur incinération demande de ce fait un apport d’énergie plus important.

On comprend bien, dans ces conditions, que l’incinération est le mode de traitement le plus cher. Ce qui oblige les collectivités à faire tourner un incinérateur à plein régime sur plusieurs années pour amortir les coûts. Le choix de cette technique apparaît donc de facto irréversible et représente un frein à la réduction des déchets et au développement du recyclage.

 

La Directive européenne 2008/98/CE classe les modes de traitement des déchets : l’incinération, en tant que valorisation énergétique, arrive en avant-dernière position, juste avant l’enfouissement. Cette hiérarchie place en premier la prévention et la réduction des déchets, leur réemploi pour donner une seconde vie, et enfin le recyclage. Trois principes qui constituent les piliers de la politique dite des « 3R » : Réduire, Réutiliser, Recycler.

 

Concernant l’agglomération parisienne, la mise en oeuvre d’une telle politique de gestion des déchets permettrait de diminuer considérablement leur production. En incitant les habitants à réduire leurs déchets, ne serait-il pas possible d’optimiser les incinérateurs fonctionnels en Ile-de-France ? Se pose alors clairement la question de la nécessité de reconstruire à Ivry  une usine vieillissante d’une aussi grande dimension.

 

 

Mélange de matière organique (toute matière non minérale) qui va subir une décomposition à l'air libre et former de l'engrais.  


Traitement des déchets organiques qui conduit à une production combinée de gaz convertible en énergie (biogaz), et d’un digestat (les déchets « digérés »), utilisable comme compost.


L'Agence De l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie a pour but de susciter, coordonner, faciliter ou réaliser des opérations ayant pour objet la protection de l'environnement et la maîtrise de l'énergie.

 

Ici, il s'agit du résidu solide de la combustion des déchets urbains dans les usines d'incinération.

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Centre National Indépendant d'Informations sur les Déchets. Association créée en 1997 qui a pour but de porter la voie des citoyens, collectifs et associations dans le domaine complexe et technique des déchets.


Agence métropolitaine de gestion des déchets ménagers. C'est un établissement public qui traite et valorise les déchets ménagers de 5,7 millions d'habitants de 84 communes de l'agglomération parisienne.

 

Produit de la méthanisation, il est constitué d’une multitude de gaz : méthane (50%), CO2 (40%) et 10 % d'autres gaz.

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LE TERRITOIRE GÉRÉ PAR LE SYCTOM, EN AGGLOMÉRATION PARISIENNE 

© Vincent Kranen

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