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Paris, le mauvais élève 

PARIS CROULE SOUS LES POUBELLES. N'AYANT PAS LA PLACE DE TRAITER SES ORDURES INTRA-MUROS, ELLE ALIMENTE L'INCINÉRATEUR D'IVRY. MAIS ELLE COMPTE BIEN AMÉLIORER SA GESTION DES DECHETS. 


Paris à la traîne 

Elle ne fait pas figure de modèle. Selon le rapport annuel sur les déchets de Paris, la municipalité parisienne n’a réalisé aucun progrès entre 2010 et 2013 dans le traitement de ses déchets recyclables. Bien souvent, ceux-ci atterrissent directement dans le bac à ordures générales sans aucun tri effectué par les Parisiens. Pourtant, si l’on enlève les déchets recyclables des poubelles classiques celles-ci perdraient 70% du total de leurs poids.



Peu d’espaces sont dédiés aux ordures ménagères. Depuis les débuts du ramassage des ordures ménagères, avec le fameux arrêté de 1884 du préfet Eugène Poubelle, la Ville de Paris a préféré ne pas traiter ni conserver sur place ses déchets. Les communes de banlieues voisines devant alors s’en occuper à sa place, comme aujourd’hui à Issy-les-Moulineaux (92), Saint-Ouen (93), Romainville (93) et Ivry-sur-Seine (94). Or, au moment même où la municipalité cherche à développer des espaces de tri et de dépôt des encombrants à proximité des Parisiens, le foncier disponible s’est aujourd’hui considérablement raréfié avec l’explosion du prix du mètre carré.


Paris a une densité importante. Avec une densité moyenne en 2011, de 21 347 habitants au km² pour 156 en France métropolitaine, la densité de population de Paris reste l’une des plus importantes d’Europe. Près de quatre fois celle de Londres ou de Moscou. Avec une telle concentration humaine dans un espace limité, le ramassage au quotidien des 3 000 tonnes d’ordures ménagères paraît donc plus compliqué dans un coeur de ville ancien, non configuré pour la circulation automobile. Idem pour les véhicules de ramassage des ordures ménagères en effet, la Ville de Paris dispose de pas moins de quatre types de véhicules différents de la voie extra-large à étroite.


Le tri des bio-déchets est limité. En moyenne, chaque poubelle parisienne contient 17,5% de déchets putrescibles, ou bio-déchets (épluchures, restes de repas, etc.), soit quasiment un cinquième du volume des poubelles d’ordures ménagères. Seuls les gros producteurs de bio-déchets comme les restaurants – et bientôt les cantines scolaires – expérimentent depuis 2012 la mise en place d’un ramassage spécifique. Actuellement, la mairie de Paris n’envisage pas d’organiser un ramassage de ces déchets chez les particuliers.


Pourtant, depuis le 16 juin 2014, le Conseil de Paris s’est engagé sur une trajectoire à zéro déchet enfoui ou incinéré. Pour respecter cet objectif, la capitale va devoir développer en masse le tri à la source des matériaux recyclables chez les professionnels et les particuliers. Certains élus socialistes réfléchissent même à une fiscalité spécifique avec une TVA dont le produit irait directement au financement des filières du recyclage. D’ici à  2030, l’Union européenne souhaite que, comme en Autriche, 70 % des déchets municipaux soient recyclés.


Objectif bon élève

"Au conseil de Paris, un voeu a été voté sur une trajectoire zéro déchet. "                                           Léon Garaix - Directeur adjoint au conseil de Paris 


Outre la mairie de Paris, la volonté de tendre vers le zéro déchet à Paris est également portée par les élus du SYCTOM. L’agglomération parisienne est déjà engagée en matière de prévention à travers le programme « Métropole prévention déchets 2010-2014 ». Il finance des actions visant à réduire les déchets incinérés : déploiement de composteurs dans les quartiers, soutien aux ressourceries, sensibilisation des habitants, fabrication de kits « cuisine anti-gaspi »… Les exemples sont nombreux.

Pour aller plus loin dans la mise en oeuvre du zéro déchet, il est nécessaire de mieux trier nos déchets à la source. Mais cette volonté se heurte à un contexte urbain difficile. 


« Aujourd’hui, tous les immeubles parisiens ne sont pas équipés en collecte sélective car il n’y a pas la place pour installer les différentes poubelles », explique Catherine Boux, Directrice générale adjointe de l’exploitation et de la prévention des déchets du SYCTOM.


Des associations reprochent en effet au SYCTOM de ne pas s’engager suffisamment dans la prévention. En 2014, il aurait dépensé « de mémoire, environ 600 000 euros de subventions pour les collectivités adhérentes » se souvient Catherine Boux. Pour les associations, ce budget semble dérisoire face au coût du projet d’Ivry, s’élevant à plus de 2 milliards d’euros pour la construction et l’exploitation de la future usine.


Ces 600 000 euros n’incluent pas le salaire des huit agents du SYCTOM chargés de la prévention au quotidien. De plus, Catherine Boux souligne que « en matière de prévention, ce n’est pas le budget qui est important, c’est la portée des actions. La subvention a-t-elle été un bon levier ? A-t-elle permis de changer les comportements des habitants sur le long terme ? ».


Une meilleure gestion des déchets passe aussi par la sensibilisation des citoyens à travers des campagnes. Un apprentissage qui nécessite un réel engagement de la part des élus et des citoyens pour permettre une réelle transition vers le zéro déchet.


"S’occuper des déchets organiques et de la tarification, ce sont les deux incontournables d'une démarche zéro waste." 

                                                     

Flore Berlingen - Présidente de ZeroWaste France 

© Alsified

Pour aller plus loin : Ailleurs, des idées en marche 

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RÉPARTITION DES INCINÉRATEURS ET DES SITES D'ENFOUISSEMENT TRAITANT LES DÉCHETS FRANCILIENS